Les meilleures bandes annonces

J’ai toujours adoré les bande-annonces, j’ai l’absolue conviction qu’elles sont un art en soi : comment en dire le moins possible tout en donnant le plus envie, en rendant l’attente insoutenable.


Une bande annonce réussie est le plus souvent une bande annonce qui donne le ton du film sans rien dévoiler de son intrigue. Inversement une bande annonce ratée est une bande annonce qui dévoile l’entièreté de l’intrigue (exemple : celle de Voyage au Bout de l’Enfer), ou, pour les comédies, écueil très courant, qui met l’entièreté des bons moments.

Une bande annonce très réussie annonce souvent un bon film, il arrive néanmoins parfois qu’un chef d’œuvre ait une bande annonce assez nulle qui ment sur le ton du film (Bons Baisers de Bruges) et , à contrario, qu’un mauvais film ait une bande annonce puissante (le dernier Godzilla).

 

Ce dossier est une liste non exhaustive des meilleures bandes-annonces, de celles que l’on ne peut s’empêcher de voir et revoir. 

L'idée de ce dossier est venue après avoir vu les excellentes bandes-annonces du dernier chef d'oeuvre de George Miller : Mad Max 4
Elles arrivent à montrer avec brio ce que le film est : une chorégraphie violente de feraille brisée. C'est ainsi que  les monteurs ont réussi à créer une bande sonore, une véritable musique, pour le trailer faite de bruits de moteurs, d'explosion, de détonations, en parfaite adéquation avec l'action.

Sans dévoiler l'intrigue, les phrases claquent : "you want to get throw this ?", "here they come again" et témoigne de cet opéra de la survie. Les magnifiques plans qui sont choisis montrent comme des tableaux la résilience : le plan de Charlize Theron, à genoux, hurlant dans le sable, et celui de Mad Max, ensablé, relevant la tête.



Prometheus : Il est bien possible que la BA de Prometheus fasse partie de ces BA presque supérieures au film en lui même. La BA ne dit rien du film mais montre le desespoir, fait raisonner le "Please !" et donne à ce court clip une dimension quasi-métaphysique tout à fait propice au cinéma SF et a tout pour exciter la curiosité du spectateur.

Pourtant le choix de la musique stridente et angoissante en dit plus qu'il n'y parraît : il s'agit d'un nouveau mix de la bande sonore de...la première bande annonce d'Alien !


Autre film de SF à la BA magnifique : Gravity. Elle s'ouvre par la sublime musique au piano de Spiegel Im Spiegel de Arvo Part, pour accompagner la poésie mélancolique du paysage spatial. La BA nous donne ensuite le ton de ce film de survie métaphysique ponctuée par les cris paniqués de Sandra Bullock : "what do i do ?", les bruits de l'espace, et la respiration halletante. La seconde bande annonce, elle, monte crescendo, en parallèle au desir de vie de la héroïne : "tell her i'm not quiting" crie la combattante de ce grand film féministe.  


Impossible de faire un dossier sur les meilleures bandes-annonces sans mentionner des maîtres en la matière : les Frères Coen


On commence avec celle de leur film culte The Big Lebowsky , tout aussi déjenté que le long métrage en lui même. Pas un dialogue, juste une succession de scènes de ce chef d'oeuvre d'absurdité structurée, accompagnée de Just Dropped In de Kenny Rogers & the First Edition. 



Leur film noir The Barber, l'homme qui n'était pas là, bénéficie lui aussi d'une belle bande annonce qui dit beaucoup de la lourde mélancolie de ce barbier par sa voix lourde et grave que l'on entend par dessus la mélodie au piano. 


Incroyable bande annonce que celle de leur chef d'oeuvre No Country For Old Men, qui, à base de split screens,  présente l'incroyable psychopathe joué par Javier Bardem et son arme étrange. Avec son esthétique vintage, ses rednecks à l'accent sudiste, la BA garde certaines des meilleures répliques : "I'm fixin to do something dumber than hell, but i'm going anyways", "just how dangerous is he ? - compared to what ? to bubonic plague ?" sublimées par la musique virile de The Black Angels : Young Men Dead


Burn After Reading, film au ton plus léger, a une BA hilarante : sans nous dire de quoi parle l'intrigue, elle nous dit pourtant tout : "what is it ? - what is it ? - Yes ? - that's fantastic" pendant que s'affiche le casting de rêve et que l'on entend l'énergique Grounds for Divorce de Elbow. 



Rythmée par les grognements de souffrance du héros et de des coups qu'il reçoit, et une voix faussement rassurante lui indiquant "it's gonna be fine", la BA de A Serious Man, qui se conclut par Somebody to Love de Jefferson Airplane, ne peut qu'exciter et intriguer. 



Il y a une place ici pour la bande annonce parfaite de leur Western , True Grit, où l'on entend Johnny Cash et la voix abimée de Jeff Bridges



Mais les frères Coen ne sont pas les seuls à être des experts dans l'art de la bande annonce, le génial Nicolas Winding Refn, digne héritier de Stanley Kubrick et d'un cinéma extrêmement sensitif a lui aussi le talent d'exprimer en quelques minutes bien choisies l'esprit de ses films. 

La BA de Pusher, quasiment filmé caméra au poing, violent, où l'engrenage dans lequel s'enferme le personnage est ici montré par cette dette qui ne fait qu'augmenter :


La bande annonce de Bronson, qui annonce "l'Orange Mécanique du 21eme siècle" fonctionne notamment sur un procédé assez efficace que l'on retrouve régulièrement dans les BA de qualité : un décalage certain entre la bande-son et l'action, la violence de ce prisonnier le plus dangereux d'Angleterre étant ici transposée sur It's a Sin de Pet Shop Boys 



Vahalla Rising, film aux allures de voyage initiatique, dispose d'une bande annonce ultra-violente, accompagnée d'une bande son contemporaine, rythmée par les bruits de lame, de chairs déchirées, et les grognements de souffrance, ainsi que les deux ou trois dialogues du film à la musicalité affirmée : "He is driven by hate, it's how he survives, why he never loses",  "can use a good fighter like you", "The boys said he was from hell, maybe it's where we're going", qui illustre bien son propos. 


Magnifique film d'amour, déguisé en thriller mélancolique numérique, Drive sait aussi comment affirmer son talent en moins de deux minutes en donnant un indice sur tout ce qui fait le génie de ce film : une photographie splendide, une superbe bande son, une violence brillamment chorégraphiée et des acteurs hors du commun.



Si l'extrême radicalité d'Only God Forgives, beaucoup plus sec, moins grand public que Drive, a pu en décevoir certains, ses bandes annonces ont su séduire. 
Ultra esthétique, violent et érotique, la poésie macabre de ce film freudien scintille comme les lumières de la Thaïlande dans ces courts extraits. "You want to fight ?"


C'est avec une impatience certaine que l'on attend la BA de son prochain film : The Neon Demon.

Alejandro Gonzalez Inarritu, autre cinéaste affectionnant un cinéma très sensitif, prend lui aussi soin de ses bandes annonces. 

Chef d'oeuvre à elle toute seule, la BA de Biutiful est un modèle du genre. Ce film qui se déroule en Espagne est ici magnifié par la récitation d'un extrait d'un ouvrage de Haruki Murakami, volontairement en anglais pour preserver une rythmique des mots. Absent du film, il s'agit d'exprimer la résilience dont parle cette oeuvre. 



"Sometimes fate is like a small sandstorm that keeps changing directions. You change direction but the sandstorm chases you. You turn again, but the storm adjusts. Over and over you play this out, like some ominous dance with death just before dawn. this storm isn't something that blew in from far away, something that has nothing to do with you. This storm is you. Something inside you. So all you can do is step right inside the storm.

Make no mistake about it: it will cut through flesh like a thousand razor blades. People will bleed there, You'll catch that blood in your hands, your own blood and the blood of others.

And once the storm is over you won't remember how you managed to survive.
But one thing is certain. When you come out of the storm your life won't be the same. It will be beautiful"


Les bandes annonces de son dernier film, The Revenant, qui sortira le 27 janvier 2016, où l'essouflement de Leonardo Di Caprio sert de musique, ont elles aussi beaucoup fait parler d'elles : 



Cette nature que l'on voit dans The Revenant, est également souvent célébrée par Terrance Malick. C'est le cas dans la bande annonce de l'extrêmement ambitieux Tree Of Life, qui pourraît presque être résumée comme une "bande annonce de la vie et l'univers", qui, bien qu'à la limite du New Age, reste très très belle. 



La BA dépressive et hypnotique de son dernier film Knight of Cups marquée par une rupture de ton entre entre une première partie électronique sur cette vie trop pleine de vide et une seconde sur cet échappatoire par la vie, l'amour et la liberté, mérite aussi un coup d'oeil. 


Dans un tout autre registre, la BA du film post-11 septembre Cloverfield savait mettre en scène cette terreur urbaine, l'effondrement soudain du sentiment de sécurité américain : les hurlements  répétés ("Oh my god !") devant la tête décapitée de la statue de la Liberté filmés caméra à l'épaule rappellent des images tristement célèbres. 


Ce que Cloverfield a compris, c'est que pour faire peur, il ne faut mieux pas trop en montrer, rester dans la suggestion horrifique. Cette notion n'est pas nouvelle, on la retrouve dans la très angoissante bande annonce de The Shining.



Dans le registre de l'action, les trailers des Mission Impossible traduisent avec brio la tension extrême des différents épisodes, toujours avec le même thème musical mais samplé différement. 


Evil Dead, indéniable mauvais remake d'un film déjà au goût douteux, bénéficiait toutefois d'un trailer, de par sa violence et son glauque extrême, absolument terrifiant, et comme c'est ce qu'on demande à un film d'horreur... 


Tout en restant dans l'ultraviolence mais dans un registre tout de même assez différent : les films de Quentin Tarantino bénéficient systématiquement de bandes annonces absolument jouissives. 

Même son premier film Reservoir Dogs : "Why Mr Pink ?" "Because you're a fag alright ?"


Pulp Fiction (1994) , Palme d'or au Festival de Cannes 


Discours militaire sadique, accent texan de Brad Pitt et musique métal en fond, difficile de faire plus excitant que la BA de Inglorious Bastard

Depuis Quentin Tarantino s'est lancé dans le western. La BA de Django Unchained, accompagné par la fameuse I'm a Man fait son effet à coup sur. "Django, the D is silent". 



Pour continuer dans un style déjanté, mais cette fois français, Romain Gravas met le talent qu'il a pour la réalisation de clips au service de la bande annonce de son premier film Notre Jour Viendra : discours lyrique de Vincent Cassel, mix du bruit d'une alarme et éruptions de violences. 


Autre premier film très radical d'un "fils de" : Antiviral de Brandon Cronenberg, avec ses incroyables effets sonores à base de bruits hospitaliers, de toux, de portes qui grincent, d'un couteau qui frotte contre une assiette et du "Please!" strident qui revient comme un refrain, qui retranscrivent parfaitement l'expérience oppressante et angoissante de ce film. "You started bleeding yet ? - Bleeding ? - From your mouth..


Du talent pour les BA, David, le père de Brandon, en a aussi, la preuve avec celle de Cosmopolis



Plus minimaliste, moins violent, la BA de The Limits of Control de Jim Jarmusch fait ressentir toute la poésie mélancolique de son réalisateur. 


"Everything sits in the order somewhere  and everything reaches an understanding. Things survive because they're strong. You may think that you're one of the strong creatures but you're not, you're one of the weak ones. You've survied because you've been protected by the strong. But they're not strong anymore.

C'est ainsi que commence la nietzchéenne bande annonce du brillant Animal Kingdom qui fonctionne notamment sur le décalage créé par le fond musical : All Out of Love de Air Supply... 


Son talent pour les bandes annonces, David Michôd l'a exprimé une seconde fois avec The Rover, en reprenant d'ailleurs à peu près les mêmes procédés qu'avec Animal Kingdom. La musique qu'il choisit est cette fois la très belle Enter One de Sol Seppy. 


Pour poursuivre dans le genre post-apocalyptique, la noirceur et le desespoir de la bande annonce de Terminator 4 avait quelque chose d'inattendu. 



Christian Bale a la capacité des grands acteurs à se fondre dans des rôles radicalement différents, comme dans The Fighter, où il incarne un boxeur défoncé au crack...


Il sait aussi jouer Batman... Surfant sur la terreur post-11 septembre, sur ce sentiment de déclin américain et de monde qui s'écroule, la bande annonce de Dark Knight Rises sur fond d'hymne américain a quelque chose de glaçant et de terriblement efficace. 


Impossible de faire un dossier complet sur les meilleures bandes annonces sans mentionner quelques films de Martin Scorsese

Les infiltrés 


La terrifiante BA de Shutter Islands :


Parce que Libre Cinéma n'a pas peur d'apprécier et de parler de toutes sortes de films, on mentionne même ici la bande annonce ultra bad-ass et très drôle d'Antigang

 

Mais pour revenir à des brigades "antigang" un peu plus sérieuses, la bande annonce de Sicario


Autre trailer ultra-tendu, celui d'Un Prophète de Jacques Audiard 



Sous forme de voyage initiatique, la bande annonce du western désabusé The Homesman


En prime deux bandes annonces de films à sortir. Celle de London Has Fallen qui a fait polémique en Grande Bretagne : on comprend pourquoi...et celle du très attendu Suicide Squad


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